Alice et la Reine de Coeur : Retour au Pays des Merveilles – rencontre avec Matteo Borghi, metteur en scĂšne

Alors que les prĂ©paratifs de la prochaine crĂ©ation originale de Disneyland Paris battent leur plein, nous avons demandĂ© Ă  ses crĂ©ateurs de nous donner un avant-goĂ»t de l’expĂ©rience unique qui nous attend au printemps prochain au Parc Walt Disney Studios. Nous dĂ©butons aujourd’hui avec Matteo, qui n’est autre que le Concepteur et Metteur en scĂšne du spectacle.

Matteo, comment t’est venu le concept de ce tout nouveau spectacle ?

Je voulais proposer Ă  nos visiteurs une expĂ©rience totalement diffĂ©rente de ce que nous connaissons dĂ©jĂ  au Parc Walt Disney Studios. D’un cĂŽtĂ©, Mickey et le Magicien est un spectacle d’illusions musical et de l’autre, TOGETHER : une Aventure Musicale Pixar utilise la technologie pour plonger les spectateurs dans les univers Pixar. J’avais envie d’imaginer quelque chose de complĂštement diffĂ©rent, qui surprenne nos visiteurs. Et dans le mĂȘme temps, je voulais rendre hommage Ă  un Classique de l’animation Disney. Alice aux Pays des Merveilles m’est rapidement apparu comme un choix Ă©vident car c’est l’une des histoires Disney les plus universellement connues. Tout le monde connaĂźt Alice, La Reine de CƓur ou encore Le Chapelier Fou, et leurs aventures sont magnifiquement cĂ©lĂ©brĂ©es au Parc Disneyland Ă  travers les attractions Alice’s Curious Labyrinth et Mad Hatter’s Tea Cups. Je savais que je pouvais m’appuyer sur ces rĂ©fĂ©rences pour mieux m’amuser avec ces personnages iconiques.

Il est vrai que cet univers se prĂȘte Ă  toutes les extravagances.

En effet. Tout est possible au Pays des Merveilles ! J’ai conçu ce spectacle dans un cadre unique : cette scĂšne extraordinaire de 68 mĂštres de long et 16 mĂštres de profondeur qui accueillait jusqu’en 2020 le spectacle Moteur
 Action ! Stunt Show Spectacular, et que nous avons transformĂ©e pour l’occasion. C’est un magnifique terrain de jeu pour lequel j’ai imaginĂ© quelque chose de grand, de colorĂ© et de foisonnant ; une expĂ©rience Ă  la fois inĂ©dite et Ă©tonnante.

Comment as-tu réinterprété le film original de 1951 ?

Pour ce qui est du style graphique et de la scĂšne elle-mĂȘme, j’ai beaucoup rĂ©flĂ©chi avec notre ScĂ©nographe Olivier Dusautoir. Nous nous sommes posĂ©s et avons Ă©changĂ© des idĂ©es sur la maniĂšre dont nous pouvions reprĂ©senter le Pays des Merveilles. Il Ă©tait important pour nous de garder les Ă©lĂ©ments clefs du film de 1951 comme le labyrinthe, les petits animaux de la ForĂȘt de Tulgey et d’autres rĂ©fĂ©rences iconiques du dessin animĂ©, tout en leur apportant une touche de modernitĂ©. En pĂ©nĂ©trant dans l’univers de ce spectacle, c’est comme si on se rĂ©veillait au Pays des Merveilles, mais en 2024.

L’écrin idĂ©al pour raconter une nouvelle histoire.

Exactement. J’ai travaillĂ© en parallĂšle avec l’auteur Ludovic-Alexandre Vidal (qui a Ă©galement participĂ© Ă  la crĂ©ation du spectacle La Fabrique des RĂȘves de Disney Junior) sur l’histoire que nous voulions raconter. Nous sommes partis d’un moment iconique du film, la partie de thĂ© du Chapelier Fou, et nous nous sommes demandĂ© comment lui faire suite. En regardant le Classique de 1951, nous nous sommes rendu compte que l’histoire ne se terminait pas vraiment. Il y a la partie de croquet, suivie du procĂšs d’Alice, qui s’interrompt brusquement quand cette derniĂšre se rĂ©veille. Nous avons donc imaginĂ© une nouvelle partie de thĂ© pour laquelle le Chapelier Fou convie tous nos visiteurs, ainsi que deux invitĂ©es d’exception : Alice ainsi que la Reine de CƓur, qui se retrouve Ă  nouveau face Ă  face. La Reine de CƓur n’est pas contente car elle considĂšre que c’est elle, et elle seule, qui devrait ĂȘtre l’invitĂ©e de marque. S’en suit un nouveau face-Ă -face entre Alice et la Reine, qui va ĂȘtre l’occasion de conclure la partie de croquet et de dĂ©cider finalement laquelle des deux sera cĂ©lĂ©brĂ©e. Tout cela sous l’Ɠil du Chapelier Fou, qui gĂšre les choses, disons
 Ă  sa maniĂšre !

L’espace scĂ©nique de ce spectacle est immense et pour autant, tout est fait pour qu’il y ait une vĂ©ritable proximitĂ© avec le public.

Nous voulions vraiment que le public se sente en immersion dans cet univers et impliquĂ© dans notre histoire. Quand on dĂ©couvre ce dĂ©cor unique, on est immĂ©diatement plongĂ© dans le Pays des Merveilles. Pour ce faire, nous avons rapprochĂ© la scĂšne des gradins par rapport Ă  la configuration d’origine.

De plus, nous voulions que nos visiteurs se sentent connectĂ©s Ă  l’un ou l’autre personnage, et qu’à un moment donnĂ©, ils puissent influencer la fin du spectacle en dĂ©cidant du dĂ©nouement de l’histoire. Car c’est bien cela le Pays des Merveilles : on ne sait jamais Ă  quoi s’attendre ! C’est aussi ce qui fait d’Alice et La Reine de CƓur : Retour au Pays des Merveilles un spectacle trĂšs moderne, avec un message rĂ©solument actuel. Dans notre histoire, il n’y a pas de gentille ou de mĂ©chante. Les deux protagonistes sont intĂ©ressantes et vĂ©hiculent des idĂ©es non pas opposĂ©es, mais complĂ©mentaires. Alice incarne l’idĂ©e qu’il faut croire en ses rĂȘves, croire en son imagination. C’est grĂące Ă  cela que chacun d’entre nous peut crĂ©er son propre univers et changer le monde. Évidemment, la Reine de CƓur est beaucoup plus autocentrĂ©e. Elle va dĂ©fendre sa propre vision, Ă  savoir qu’il faut croire en soi pour rĂ©ussir tout ce qu’on entreprend. Les deux messages sont importants, et cette dualitĂ© s’exprime notamment Ă  travers la musique et les disciplines artistiques en prĂ©sence.

En effet, la musique joue un rĂŽle clef dans ce spectacle.

Je dirai mĂȘme que c’est le centre de tout. Il Ă©tait vraiment important pour moi de proposer des musiques qui puissent faire rĂ©sonner ce vaste espace. Des musiques inĂ©dites, trĂšs actuelles, mais qui rendent en mĂȘme temps hommage au dessin animĂ© en intĂ©grant des clins d’Ɠil aux mĂ©lodies de 1951. Pour Alice, nous sommes partis sur un style pop, voire K-pop par moments, trĂšs joyeux, trĂšs festif, qui est Ă©galement associĂ© au Chapelier Fou. De son cĂŽtĂ©, La Reine de CƓur est associĂ©e Ă  un univers rock classique, avec percussions et guitare Ă©lectrique. Nous avons fait diffĂ©rents essais au niveau des styles et nous avons trouvĂ© que cette dualitĂ© fonctionnait parfaitement pour notre spectacle.

La grande force de cette musique tient aussi au fait qu’elle est interprĂ©tĂ©e pour une grande part en live.

Tout Ă  fait. Pour chaque spectacle, nous avons six chanteurs sur scĂšne. Il y a Alice, bien sĂ»r, La Reine de CƓur et le Chapelier Fou ainsi que La Chenille, Le LiĂšvre de Mars et le Lapin Blanc, qui chantent et aident Ă  raconter l’histoire. De plus, nous avons quatre musiciens : deux percussionnistes, qui jouent des instruments conçus spĂ©cialement pour notre spectacle, ainsi qu’un guitariste et un joueur de keytar, un clavier-guitare.

C’est aussi un spectacle qui intùgre de trùs nombreuses acrobaties, dont certaines jamais vues à Disneyland Paris.

Comme je le disais, tout est parti de la musique. Une fois que nous avions dĂ©terminĂ© l’univers musical d’Alice et celui de la Reine de CƓur, je me suis demandĂ© quelles disciplines artistiques pouvaient aller de pair avec ces styles.

En mĂȘme temps, je devais prendre en compte la taille de la scĂšne, tant sur le plan horizontal que vertical, afin d’en utiliser toutes les potentialitĂ©s. J’ai donc fait appel Ă  deux disciplines diffĂ©rentes qui ont cette capacitĂ© unique de rĂ©sonner avec la musique : le trampoline et le bmx.

Nous avions dĂ©jĂ  utilisĂ© le trampoline dans certains de nos spectacles Ă  Disneyland Paris, mais jamais sous sa forme de « trampo-mur ». Cela permet de mettre en valeur la hauteur de nos dĂ©cors et, dans le mĂȘme temps, de faire Ă©cho Ă  l’énergie et Ă  la sensation de rebond de la musique.

Quant au bmx, on l’envisage souvent comme un sport, ce qui est vrai, mais on oublie trop souvent que cette discipline peut ĂȘtre une forme d’expression artistique quand on l’associe Ă  la musique.

Dans les deux cas, on peut créer des images saisissantes et une véritable chorégraphie.

Justement, comment as-tu abordé la dimension chorégraphique de ce spectacle ?

Un spectacle musical sans danseurs n’aurait pas de raison d’ĂȘtre.

J’ai donc fait appel aux chorĂ©graphes CĂ©line et CaĂŻn Kitsais, qui ont auparavant participĂ© Ă  TOGETHER : une Aventure Musical Pixar, car ils ont exactement l’esprit que je recherchais. Nous avons fait beaucoup de recherche et d’expĂ©rimentation pour traduire cet univers dĂ©calĂ© qu’est le Pays des Merveilles Ă  travers des chorĂ©graphies originales.

Il faut Ă©normĂ©ment d’énergie pour habiter cette scĂšne gigantesque, et nous vous rĂ©servons quelques surprises qui vont aider Ă  rendre notre spectacle encore plus dynamique.

Je ne vous en dis pas plus


C’est un vĂ©ritable travail d’équipe.

En effet.

Nous crĂ©ons et travaillons nos chorĂ©graphies en groupe avant de les apprendre Ă  toute l’équipe des danseurs.

C’est un moment de recherche trĂšs important au cours duquel les images que j’ai en tĂȘte vont se confronter Ă  la vision et au feeling artistiques que les chorĂ©graphes ont construits de leur cĂŽtĂ© en Ă©coutant la musique.

À cela s’ajoute aussi la contribution des Capitaines de danse et des artistes, qui apportent eux aussi leur propre crĂ©ativitĂ©.

Nous travaillons ainsi dans toutes les disciplines. L’idĂ©e est de partir de l’essence du dessin animĂ© et d’inventer ensemble notre propre langage artistique.

Il y a un personnage important que nous n’avons pas encore Ă©voquĂ© : le Chat du Cheshire.

Il sera bien là ! Il intervient dans le spectacle
 exactement comme un chat, c’est-à-dire quand il en a envie, et comme il en a envie ! C’est un personnage vraiment unique, plein de surprises. C’est pourquoi je ne peux vous en dire davantage pour le moment


On sent chez toi une grande affinitĂ© avec l’univers d’Alice.

C’est un univers que je connais depuis longtemps, et dans lequel j’ai eu grand plaisir à me replonger pour ce spectacle.

Cela faisait un certain temps que je n’avais pas revu le film et j’y ai dĂ©couvert toutes sortes de facettes que je n’avais pas perçues enfant. Cela m’a littĂ©ralement passionnĂ© et je me suis beaucoup documentĂ©.

J’ai lu le roman de Lewis Carroll ainsi que des ouvrages sur la crĂ©ation du film de 1951.

En dĂ©couvrant comment les artistes Disney avaient travaillĂ©, je me suis rendu compte qu’ils avaient fait la mĂȘme chose que moi : apporter leur propre vision Ă  un classique intemporel.

De fait, ce spectacle est aussi une forme d’hommage Ă  leur travail et Ă  la crĂ©ativitĂ© unique dont ils ont fait preuve.

Alice et La Reine de CƓur : Retour au Pays des Merveilles s’annonce comme une proposition trùs originale au sein du Parc Walt Disney Studios !

Disneyland Paris est un endroit incroyable, un authentique lieu de crĂ©ation oĂč tout est possible : plonger nos visiteurs au cƓur d’un dessin animĂ© ou Ă  l’inverse rĂ©inventer les classiques de maniĂšre totalement inattendue.

À mon sens, le Parc Walt Disney Studios est le lieu idĂ©al pour crĂ©er des expĂ©riences Ă  la fois immersives et diffĂ©rentes comme Alice et La Reine de CƓur : Retour au Pays des Merveilles. On peut le faire de multiples maniĂšres, dans un espace de type « blackbox » ou bien en plein air, mais le but est toujours le mĂȘme : transporter nos visiteurs au cƓur de nos histoires tout en les surprenant et en les Ă©merveillant